Lanceurs d’alerte : ouvrir les boîtes

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15 mars 2019 | 2 Min de lecture |
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L’actualité nous ramène sans cesse des controverses autour des lanceurs d’alerte. Comme si on faisait constamment passer des tests de courage à ceux qui dénoncent dans l’intérêt public.

En 1971, c’est un lanceur d’alerte qui a remis au New York Times des documents secret-défense ayant montré l’enlisement des Américains sous Nixon lors de la guerre au Vietnam.

En 1996, c’est une lanceuse d’alerte qui a révélé une affaire de pollution des eaux potables dans le sud de la Californie et qui a forcé une compagnie à s’acquitter de 333 millions $ en dommages et intérêts.

En 2009, c’est une lanceuse d’alerte qui a aidé à mettre au jour l’une des plus grandes affaires de corruption en Espagne.

Les lanceurs d’alerte ont le pouvoir de faire trembler des organisations concernant la finance, la construction, le transport, la santé et d’autres domaines.

Mais ces héros des temps modernes qui prennent des risques pour faire bouger les choses ont aussi leur part de vulnérabilité.

Chaque semaine, au moins un journaliste est tué dans un pays corrompu. Parmi les journalistes tués, un sur cinq enquêtait sur des faits de corruption. [1]

Les lanceurs d’alerte bénéficient-ils aujourd’hui d’une protection assez fiable? La loi entrée en vigueur le 9 décembre 2017 au Québec et bonifiée à la suite des recommandations de la Commission Charbonneau pour protéger les lanceurs d’alerte facilite-t-elle vraiment la divulgation des actes répréhensibles dans les organismes publics?

 

Chaque fois qu’un lanceur d’alerte est malmené, ce sont des années de confiance qu’il faut rebâtir.

 

Des boîtes

Le sujet des lanceurs d’alerte ressemble depuis des années à un grand entrepôt de boîtes. On met de bonnes intentions dans des boîtes, on oublie un peu les boîtes, on sort des projets de loi de certaines boîtes pour les remettre dans d’autres, on renforce les boîtes et puis on les déplace encore. Ça devient mélangeant à la longue.

Tellement mêlant que les gens qui ont des actes à dénoncer ne savent plus s’il est utile de lancer une alerte. Et souvent, ils savent encore moins vers qui se tourner.

Vous, par exemple. Si vous découvriez que deux entreprises d’asphalte s’entendaient entre elles pour fixer les prix du marché, à qui auriez-vous le réflexe de le signaler?À l’UPAC? Au Bureau de la concurrence du Canada ou au Directeur des poursuites criminelles et pénales? À la police ou à l’un des bureaux d’inspecteurs généraux? Ou encore au ministère des Affaires municipales ou au Protecteur du citoyen?

Peut-être auriez-vous plutôt l’idée de révéler vos informations à un journaliste, comme l’ont fait plusieurs personnes ici et ailleurs?

Les entreprises sont des boîtes. Nos bureaux sont des boîtes. Nos lois sont des boîtes. C’est encadrant, les boîtes. Nécessaire et structurant, aussi. Mais qu’arriverait-il si nous pensions à l’extérieur des boîtes?

 

Croire pour ne pas qu’ils se taisent

Le vrai fond du débat n’est pas tant la protection des lanceurs d’alerte que l’importance de les croire.

Les gens qui dénoncent n’auront jamais la garantie bétonnée d’être à l’abri de représailles. Mais ce qu’ils doivent avoir à tout prix, c’est la certitude d’être entendus et crus.

Leurs alertes sont certes fondées sur des doutes sérieux plutôt que sur des preuves. Mais si leurs preuves étaient irréfutables, ils n’auraient pas à lancer d’alertes.

Nous devons croire ceux qui acceptent d’être des perturbateurs et empêchent des infractions d’avoir lieu.

Nous devons croire ceux qui nous tirent de notre somnolence et font agir les pouvoirs publics avant qu’il soit trop tard.

Nous devons croire les individus qui, par leur vigilance, détectent les indices de menaces et cherchent à en atténuer les effets dans l’intérêt de tous. Ils nous rendent de fiers services en levant le coin du tapis sur les ratés, notamment dans l’industrie de la construction.

Nous n’avons plus le droit de faire subir aux lanceurs d’alerte un parcours du combattant ou une course à obstacles.

Les lanceurs d’alerte sont des sculpteurs qui font sortir des vérités du roc. C’est dur. C’est exigeant. C’est stressant.

S’ils gardaient le silence, les magouilleurs continueraient de sévir.

C’est parce que les lanceurs d’alerte sont indispensables que nous devons impérativement nous assurer d’être les gardiens de ces gardiens.

 

 

Lire aussi : Bureaux d’inspecteurs généraux : des radars qui sauvent des sous
Lire aussi : Jacques Duchesneau raconte

 

[1] https://transparency-france.org/actu/indice-de-perception-de-la-corruption-2017/

 


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